Une façade ciselée comme un bijou, symbole de la Renaissance à Beaugency
La récente rénovation de la place du docteur Hyvernaud met en valeur ce monument historique emblématique. Très bel exemple de l’architecture civile de la Renaissance, l’hôtel de ville est construit entre 1526 et 1530 ou 1532. Sa façade associe des formes architecturales médiévales à des décors inspirés de la Renaissance française et italienne.
Entre pouvoir du peuple et influence des seigneurs
La prospérité retrouvée, les échevins de Beaugency, magistrats qui représentent le peuple, décident de remplacer la maison de ville, située au pied de la tour du Change et devenue trop étroite.
Trois procureurs « des manants et habitants de la ville de Beaugency », Jehan Pyvin, Denis Billaut et Estienne Lorion, achètent le terrain de l’auberge de la Croix-Blanche en 1526. L’hôtel de ville est achevé avant 1533, année de la mort de Jean d’Orléans-Longueville, seigneur de Beaugency, archevêque de Toulouse puis cardinal d’Orléans. Jean d’Orléans-Longueville est le petit-fils de Jean « le Bâtard d’Orléans », comte Dunois, célèbre compagnon d’armes de Jeanne d’Arc.
Plusieurs calcaires sont utilisés : du tuffeau du Val de Loire, du calcaire de Beauce, et surtout de la pierre d’Apremont-sur-Allier (Cher) de couleur sable.
Une frise sépare le rez-de-chaussée de l’étage. Sur l’un des encarts se devinent deux béliers qui portent les armes de Jean d’Orléans-Longueville surmontées d’une croix archiépiscopale. Sur un autre, la salamandre de François Ier symbolise le pouvoir royal et la devise de Beaugency « Manibus date lilia plenis ! » (Donner des lys à pleines mains !). Les autres écussons, malheureusement endommagés à la Révolution, présentaient les armoiries de François, comte de Dunois et de son frère le duc de Longueville, de la France et de la ville de Beaugency.
L’identité du maître d’œuvre reste mystérieuse, peut-être s’agit-il du maçon Pierre Biart, qui intervient au château sous le mécénat de Jean d’Orléans-Longueville, ou bien de l’architecte Charles Viart, tous deux d’Orléans.
L’assemblée des citoyens se réunit dans la salle d’honneur, au premier étage, jusqu’en 1682.
L’illusion de la symétrie
La façade est construite sur un principe de symétrie mais ce n’est qu’une illusion, la dissymétrie règne. L’édifice est plutôt modeste, avec deux niveaux coiffés par une toiture pentue, une galerie et deux échauguettes (tourelles d’angle) ajoutées lors d’une grande restauration au XIXe siècle.
Au rez-de-chaussée s’ouvraient deux baies de boutiques, de largeur inégale, séparées par une porte cintrée surmontée d’une imposte à baies jumelées. Ce motif composé est repris sur plusieurs maisons à Beaugency.
« Cet ensemble est la grâce même et vient prouver une fois de plus l’art que possédaient les architectes de la Renaissance de satisfaire par un agencement heureux l’esprit et le regard. Et cependant que cet agencement déroute nos idées de symétrie ! Ici, rien n’est symétrique, ni les panneaux qui sont de différentes grandeurs, ni la porte qui n’est point au milieu, ni les pilastres dont un seul est dans le même axe que son correspondant de haut, ni les fenêtres qui n’occupent point le milieu des baies du rez-de-chaussée, ni les cartouches du bandeau, rien enfin. »
Promenades pittoresques dans le Loiret, Emile HUET (textes), Paul PIGELET (dessins), 1900. Réédition par les éditions de la Tour de Gile, 1993 (p.164-165).
La salle d’honneur, au premier étage, est ornée de magnifiques panneaux de broderies. Ces huit tentures créées vers 1630-1640 et restaurées entre 2009 et 2015 constituent un bel exemple des arts décoratifs de l’époque. Probablement réalisées pour un mariage entre familles nobles, quatre d’entre elles représentent les continents, quatre autres des scènes de sacrifices. Chaque année, les Journées du Patrimoine et les visites organisées par l’office de tourisme permettent aux nombreux visiteurs de les admirer. A découvrir plus en détail ici.